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Violences scolaires : la justice sort le bâton, le début d’une « tolérance zéro » ?

L’incarcération de huit élèves à la prison centrale de Libreville, suite à de violentes rixes filmées et diffusées en ligne, marque un tournant majeur dans la réponse des autorités gabonaises à la délinquance juvénile. Qualifiée de politique de « tolérance zéro », cette décision d’une fermeté inédite soulève autant d’espoirs que d’interrogations sur sa réelle efficacité et sa conformité avec les principes de la justice des mineurs.

La semaine dernière, des scènes de bagarres d’une rare intensité aux lycées Georges-Mabignath et Paul-Indjendjet-Gondjout ont choqué l’opinion publique.

Face à cette onde de choc, amplifiée par les réseaux sociaux, la réponse judiciaire a été immédiate et spectaculaire.

Le parquet de Libreville, via sa juridiction des mineurs, a ordonné une série d’interpellations qui ont conduit au placement en détention préventive de huit adolescents.

Pour des faits qualifiés de « trouble à l’ordre public », « atteinte à la vie privée » ou encore « violences et voies de fait », la justice a privilégié l’incarcération pour les cas jugés les plus sérieux.

Cette décision est présentée comme un « signal fort et sans équivoque » destiné à endiguer un phénomène qui gangrène le milieu scolaire.

Un durcissement judiciaire assumé

Cette fermeté s’inscrit dans un contexte plus large de durcissement de l’arsenal législatif. Récemment, le gouvernement a mis en avant des sanctions renforcées, s’appuyant notamment sur l’article 230 du Code pénal, prévoyant des peines pouvant aller jusqu’à cinq ans d’emprisonnement pour des actes d’agression en milieu scolaire.

Cette nouvelle posture vise à garantir un cadre d’apprentissage apaisé et à restaurer l’ordre, là où les sanctions disciplinaires internes, comme les exclusions, étaient jugées insuffisantes.

La décision du tribunal de Libreville semble donc être la première application concrète de cette nouvelle doctrine. Elle traduit la volonté des magistrats de ne plus laisser impunis des actes dont la gravité est accentuée par leur médiatisation, transformant les cours d’école en arènes publiques.

La prison, une solution à double tranchant

Si cette approche répressive est saluée par une partie de l’opinion publique qui réclamait des mesures exemplaires, elle n’est pas sans soulever des questions fondamentales.

La détention préventive pour des mineurs doit rester, en principe, une mesure exceptionnelle. Le Code de l’Enfant en République Gabonaise encadre strictement ces placements, en insistant sur l’intérêt supérieur de l’enfant.

Des voix s’élèvent pour souligner que la répression seule ne peut être la solution durable. Des acteurs de la société civile et des spécialistes de l’enfance insistent sur la nécessité de compléter cette fermeté par des actions de prévention, de sensibilisation et de suivi psychologique.

L’incarcération, si elle peut avoir un effet dissuasif à court terme, comporte des risques de rupture scolaire et de contact avec la délinquance plus dure, compromettant la réinsertion future de ces jeunes.

L’UNICEF, tout en saluant les progrès du Gabon en matière de prise en charge des mineurs en conflit avec la loi, rappelle régulièrement l’importance de développer des alternatives à la détention.

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